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    Dossier

    Protection des représentants du personnel contre la discrimination syndicale et le délit d’entrave

    Les représentants du personnel sont protégés contre les discriminations liées à leur appartenance syndicale. Ils sont aussi protégés contre le délit d’entrave, c’est-à-dire contre toute attitude portant volontairement atteinte à l’exercice de leurs missions ou au bon déroulement de leur mandat.

    Publié le 19. 07. 22 . Mis à jour le 18. 12. 23

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    La protection contre la discrimination syndicale

    La discrimination est le fait d’établir une différence de traitement entre les individus fondée sur des critères illégitimes interdits par la loi (sexe, âge, origine…). L’appartenance syndicale d’un salarié fait partie de ces critères discriminatoires.

    Discrimination syndicale : définition et dispositions légales

    L’appartenance syndicale d’un salarié ne doit avoir aucune incidence sur son accès à l’emploi et à la formation, sa rémunération, ses conditions de travail… Toute discrimination syndicale est interdite par la loi (art. L. 1132-1 C. trav. ; art. 225-1 et 225-2 C. pén.) et constitue un délit, que le salarié soit sous mandat syndical ou non. 


    La discrimination syndicale peut être directe (le salarié est traité de manière moins favorable qu’un autre salarié dans une situation comparable) ou indirecte (une disposition apparemment neutre a tous les risques de désavantager le salarié en raison de ses activités syndicales).


    Plusieurs dispositions sont prévues par la loi pour protéger le salarié des discriminations syndicales, en particulier : 

    • la liberté pour le salarié d’adhérer au syndicat de son choix (art. L. 2141-1 C. trav.) ;
    • l’interdiction pour l’employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’exercice d’une activité syndicale pour arrêter ses décisions (art. L. 2141-5 C. trav.) ;
    • l’obligation de neutralité de l’employeur interdisant les différences de traitement entre les organisations syndicales (art. L. 2141-7 et 8, L. 2146-2 C. trav.) ; 
    • l’interdiction d’apporter des limites à l’exercice du droit syndical par note de service ou décision unilatérale de l’employeur (art. L. 2141-10 C. trav.) ;
    • la protection contre le licenciement du syndicaliste qui agit en justice (art. L. 1132-4, L. 1134-4 et L. 1235-3-1 C. trav.) ou témoigne devant la justice (art. L. 1132-3 C. trav.).

    Discrimination syndicale : les recours du salarié

    Le salarié qui estime être victime de discrimination syndicale peut, selon sa situation : 

    • saisir les membres du CSE, qui disposent d’un droit d’alerte en cas de mesures discriminatoires portant atteinte aux droits des personnes, aux libertés individuelles, à la santé physique et mentale des salariés (art. L. 2312-5 et L. 2312-59 C. trav.) ;
    • saisir l’inspecteur du travail, qui peut dresser un procès-verbal (art. L. 8112-1 C. trav.) ;
    • saisir les syndicats représentatifs au niveau national/départemental ou au niveau de l’entreprise, qui peuvent se substituer aux victimes et agir en justice ;
    • saisir le Défenseur des droits, qui peut, notamment, constater une discrimination par procès-verbal ;
    • porter plainte pour l’application de sanctions pénales (avec ou sans constitution de partie civile) ;
    • saisir le tribunal correctionnel pour une citation directe ;
    • saisir le conseil de prud’hommes pour obtenir des dommages-intérêts ou l’annulation d’une mesure (sanction disciplinaire, licenciement…), avec pour conséquence la réintégration dans l’entreprise et/ou l’indemnisation du préjudice subi.

    Les actions au civil


    En cas de recours devant le conseil de prud’hommes, c’est au salarié d’apporter la preuve de la discrimination syndicale (éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte).


    Au vu des éléments présentés par le salarié, l’employeur devra prouver que sa décision a été motivée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.


    Le juge des prud’hommes forme sa conviction après avoir ordonné toutes les mesures d’instruction qu’il estime nécessaires (art. L. 1134-1 C. trav.). 

    À savoir

    Les organisations syndicales représentatives peuvent exercer une action en justice à la place du salarié, sans avoir été mandatées. Il suffit que le salarié ait été averti par écrit de cette action et qu’il ne s’y soit pas opposé dans un délai de 15 jours (art. L. 1134-2 C. trav.).

    Les associations régulièrement constituées (depuis au moins 5 ans) pour la lutte contre les discriminations ou œuvrant dans le domaine du handicap peuvent exercer en justice toute action en faveur d’un salarié discriminé, sous réserve de justifier de son accord écrit (art. L. 1134-3 C. trav.).

    Ces organisations syndicales et ces associations peuvent également engager une action de groupe, quand plusieurs salariés (ou candidats à l’emploi) font l’objet d’une discrimination fondée sur le même motif discriminatoire et imputable au même employeur (art. L. 1134-7 C. trav.). C’est alors le tribunal judiciaire (issu de la fusion du tribunal d’instance et du tribunal de grande instance) qui est compétent (art. 826-2 à 5 C. proc. civ.).

    Les actions au pénal


    Le prévenu est toujours présumé innocent jusqu’à preuve du contraire : c’est donc au salarié d’apporter la preuve du délit de discrimination. Il doit prouver l’existence d’un lien de cause à effet entre les mesures jugées discriminatoires et son appartenance ou activité syndicale (art. 427 CPP et 225-2 C. pén.).


    Plainte simple ou plainte avec constitution de partie civile


    Le salarié peut déposer une plainte simple (sans constitution de partie civile) auprès du commissariat de police ou de la gendarmerie, qui transmettra la plainte au procureur de la République. Il peut aussi envoyer une lettre simple relatant les faits constitutifs du délit directement au procureur de la République (du tribunal judiciaire du lieu où a été commise l’infraction).

    • 6ans

      Le salarié dispose d’un délai de 6 ans pour porter plainte à compter de la date de l’infraction (art. 8 C. proc. pén.).

    Le salarié peut également déposer une plainte avec constitution de partie civile, par lettre adressée au doyen des juges d’instruction du tribunal judiciaire du lieu de l’infraction. 


    À l’inverse de la plainte simple, la constitution de partie civile permet de réclamer des dommages-intérêts, en plus de la condamnation pénale de l’employeur. De plus, elle entraîne la saisine automatique du juge d’instruction, qui doit obligatoirement instruire l’affaire, contrairement à la plainte simple, souvent classée sans suite par le procureur de la République.

    Attention !

    Pour pouvoir déposer une plainte avec constitution de partie civile, il faut avoir, au préalable, déposé une plainte simple (classée sans suite ou restée sans réponse) et avoir subi un préjudice. Le recours à un avocat n’est pas obligatoire mais vivement conseillé. De plus, le juge peut fixer une consignation, somme d’argent versée par le salarié à la suite de la première audience, qui sera conservée par le tribunal si la constitution de partie civile est jugée abusive ou dilatoire.

    Citation directe


    Autre voie de recours possible, la citation directe permet au salarié de convoquer directement le prévenu devant le tribunal correctionnel. Elle doit obligatoirement être rédigée par le salarié (avec l’aide possible d’un avocat), comporter un certain nombre d’éléments (exposé détaillé des faits reprochés, citation des textes de loi les réprimant, preuves du préjudice subi…), et être adressée au prévenu par un huissier. 


    La procédure est rapide et permet d’obtenir réparation, mais le salarié doit déposer une consignation, dont le montant est fixé par le tribunal correctionnel.

    À savoir

    Le salarié disposant de faibles ressources peut bénéficier de l’aide juridictionnelle, une prise en charge totale ou partielle par l’État des honoraires et frais de justice (avocat, huissier, consignation…). De plus, si l’issue du procès est favorable au salarié, les frais d’huissier peuvent lui être remboursés par l’auteur des faits.

    Discrimination syndicale : les sanctions contre l’employeur

    Les sanctions civiles


    Toute mesure contraire aux articles L. 1132-1 à L. 1132-3-3 du Code du travail, c’est-à-dire toute mesure discriminatoire prise par l’employeur à l’encontre d’un salarié (sanction, licenciement...), est nulle (art. L. 1132-4 C. trav.). 


    Cette nullité entraîne la réintégration et/ou l'indemnisation du salarié en cas de licenciement, et une remise à niveau dans le cadre de toute autre mesure discriminatoire.


    L’employeur coupable de discrimination syndicale peut être condamné à verser des dommages-intérêts pour préjudice moral et financier. Le salarié peut obtenir une remise à niveau de son salaire mensuel de base et bénéficier des augmentations collectives annuelles pratiquées pour son groupe et son coefficient (Cass. soc. 05/09/2018, n° 16-28745).

    À savoir

    L’action en réparation d’une discrimination syndicale devant le conseil de prud’hommes se prescrit par 5 ans, mais les dommages-intérêts réparent le préjudice entier pendant toute sa durée (art. L. 1134-5 C. trav.). Par exemple, le juge peut procéder à la reconstitution de la carrière, ordonner le reclassement et des rappels de salaire.

    Les sanctions pénales


    Le délit de discrimination syndicale est sanctionné d’une amende et d’une peine de prison fixées par le Code du travail ou le Code pénal selon les faits commis (art. L. 2146-2 C. trav. ; art. 225-2 C. pén.).


    Le délit de discrimination se prescrit par 6 ans (art. 8 C. proc. pén.). Si le délit dure dans le temps, la prescription ne commence à courir que le jour où la discrimination cesse.

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    La protection des représentants du personnel contre le délit d'entrave

    Délit d’entrave : définition et dispositions légales

    Le délit d’entrave sanctionne le fait d’avoir délibérément porté atteinte, ou d’avoir tenté de porter atteinte, à une instance représentative du personnel ou à un salarié désigné par une organisation syndicale. L’entrave peut se manifester par un comportement actif (action) ou passif (omission). 


    Pour qu’un délit d’entrave soit constitué, il faut la présence de trois éléments :

    • un élément légal (le non-respect de la loi) ;
    • un élément matériel (l’action ou l’omission imputée à une personne de l’entreprise) ;
    • un élément moral (le caractère volontaire de l’acte ou de l’omission, présumé par la constatation de l’élément matériel, et qui n’a donc pas besoin d’être prouvé).

    En pratique, l’entrave peut se rencontrer au moment de la désignation des représentants du personnel (ex. : entrave à l’organisation des élections professionnelles), ou dans l’exercice de leurs attributions (entrave à la tenue d’une réunion du CSE, réduction des heures de délégation ou des moyens d’action du CSE, non-consultation du CSE avant une décision qui l’impose…). 


    Il y a également entrave en cas de violation du statut de salarié protégé (ex. : non-respect des procédures spécifiques au licenciement d’un représentant du personnel) ou lorsqu’un syndicat n’est pas convoqué à une négociation collective (entrave à l’exercice du droit syndical).

    À savoir

    Le délit d’entrave repose sur la responsabilité personnelle de celui qui commet l’infraction. Un salarié peut être poursuivi pour délit d’entrave s’il a personnellement commis des actes répréhensibles, par exemple s’il s’est opposé à la réintégration d’un représentant du personnel.

    Délit d’entrave : les recours du salarié

    Les actions au pénal


    Le premier réflexe est de faire constater l’infraction par l’inspecteur du travail, qui pourra dresser un procès-verbal (art. L. 8113-7 C. trav.). Ce PV sera alors transmis au préfet du département, ainsi qu’au procureur de la République qui jugera de l’opportunité des poursuites devant le tribunal correctionnel.


    Le salarié victime d’entrave peut également déposer une plainte simple (auprès d’un service de police ou directement auprès du procureur de la République), puis si besoin une plainte avec constitution de partie civile (auprès du doyen des juges d’instruction du tribunal judiciaire). Il peut aussi recourir à la citation directe, pour convoquer l’auteur de l’infraction directement devant le tribunal correctionnel par l’intermédiaire d’un huissier.

    Attention !

    Pour que la constitution de partie civile ou la citation directe soit recevable, il faut justifier d’un intérêt à agir, c’est-à-dire démontrer que le délit entraîne un préjudice personnel et direct.

    • 6ans

      La prescription du délit d’entrave est de 6 ans (art. 8 C. proc. pén.).

    Les actions au civil


    La victime du délit d’entrave peut décider de ne pas porter plainte et se tourner uniquement vers les juridictions civiles pour demander des dommages-intérêts en réparation du préjudice subi. L’action sera alors portée devant le tribunal judiciaire.


    D’autre part, si l’entrave crée un trouble manifestement illicite, le salarié peut saisir le juge des référés du conseil de prud’hommes pour obtenir le retour à la légalité, par exemple sa réintégration dans l’entreprise en cas de licenciement non autorisé. 

    Délit de discrimination syndicale et délit d'entrave : quelles différences ?

    Il convient de bien distinguer le délit d’entrave de la discrimination syndicale

    Le délit d’entrave nécessite la conjugaison des trois éléments cités plus haut (non-respect de la loi, faits matériels, caractère volontaire des faits). Il suppose une atteinte à une instance représentative ou à l’un de ses membres.

    Le délit de discrimination nécessite également ces trois éléments mais, en plus, suppose que le comportement de l’employeur porte atteinte à la liberté syndicale, c’est-à-dire à l’appartenance syndicale (art. L. 2146-2 C. trav.), que le salarié victime soit représentant du personnel, désigné par une organisation syndicale, ou simplement syndiqué. Le champ de la discrimination est donc plus large que celui du délit d’entrave.

    Lorsque les faits discriminatoires visent un élu du personnel appartenant à un syndicat, cela aboutit, dans les faits, à un recoupement partiel de deux infractions distinctes : l’infraction visée par le délit d’entrave et l’infraction visée par le délit de discrimination syndicale. Dans ce cas, les deux peines sont applicables.

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